- Introduction : Plantons le décor
- Outils d'émancipation ou d'aliénation ?
- Mon approche de la recherche
- Apprendre de nos échecs : Les leçons de FairCoop
- Introduction au Deep Adaptation Forum (DAF)
- Le Diversity & Decolonising Circle
- L'équipe de recherche
- Le paysage du DAF : Cultiver la relationnalité
- Considérer le DAF d'un point de vue décolonial
- Le changement collectif radical
Considérer le DAF d'un point de vue décolonial
(un résumé)
EN BREF
- En tant que réseau, le DAF invite déjà ses participant·e·s à se défaire de plusieurs caractéristiques peu utiles des mentalités et habitudes coloniales modernes (par exemple, en accueillant tous les affects, et en mettant l'accent sur la relationnalité et l'auto-organisation).
- Cependant, la plupart des participant·e·s au DAF sont issu·e·s de milieux privilégiés (blancs, occidentaux, de classe moyenne...), ce qui se reflète dans le langage utilisé dans le réseau, dans les visions du monde concernant la possibilité d'un effondrement futur, et dans l'accent mis sur la mise en œuvre de réponses compatissantes au lieu de s'attaquer aux structures sociales capitalistes injustes. Cela peut créer des obstacles à la création de relations de solidarité avec les personnes moins privilégiées, et à la lutte contre la violence systémique et les préjudices historiques qui sont au cœur des sociétés coloniales modernes.
- Afin de travailler sur ces obstacles, les participant·e·s au DAF pourraient choisir de s'orienter vers des formes d'amour décolonial, qui donnent suffisamment d'espace à l'expression de la colère et de la rage face à ce qui se passe - et de mettre en œuvre des formes d'action et des projets qui constituent des réparations décoloniales et des pratiques de solidarité décolonisante.
- Il ne suffit pas d'exprimer et d'intégrer ses émotions difficiles face à l'état du monde : le leadership distribué doit être encouragé dans le réseau afin que davantage de groupes de projets d'action se forment, en solidarité avec celles et ceux qui sont en première ligne de la destruction socio-écologique.
- Sur le plan philosophique, il est également important de s'éloigner des binaires modernes-coloniaux, tels que la séparation humanité/nature, et de s'orienter vers des formes décoloniales de pensée écologique, qui considèrent le racisme, le sexisme ou le spécisme comme des éléments fondamentaux de la crise écologique.
Dans les articles précédents, je me suis efforcé de mettre en avant les voix et les récits de tous·tes les participant·e·s à cette recherche, et je me suis abstenu d'examiner leurs témoignages d'un œil critique. Mais dans ce résumé et le suivant, j'accorderai plus d'espace à un autre courant de recherche qui s'est développé simultanément pour moi, alors même que je réalisais mes études de cas sur FC et le DAF. Ce processus intellectuel est devenu de plus en plus central pour ma compréhension du thème du changement collectif radical : je parle d'une approche décoloniale du changement personnel et collectif.
Cette perspective m'était totalement étrangère lorsque j'ai commencé ma thèse, ce qui explique que ni mes études de cas ni les méthodologies d'évaluation de l'apprentissage social que j'ai déployées n'étaient particulièrement « décoloniales ». C'est au cours des deux dernières années de ma recherche, alors même que je commençais à rédiger ma thèse, que cette approche est progressivement devenue une partie trop importante de ma compréhension et de ma réflexion pour que je ne la reconnaisse pas et ne cherche pas à l'intégrer dans cette thèse. Cela a été en grande partie le résultat de mon implication dans le cercle D&D du DAF, et constitue donc un exemple d'apprentissage social ayant eu lieu au sein d'une communauté en ligne.
Par conséquent, je vais maintenant proposer quelques réflexions qui pourraient remettre en question les hypothèses de certain·e·s de mes participant·e·s à la recherche, en particulier dans le DAF, et examiner de plus près les lentilles socioculturelles qui caractérisent ma propre perspective – y compris ses limites, ses impacts et ses implications.
1. À propos de la pensée décoloniale
Qu'est-ce que j'entends par « pensée décoloniale » ? Voici un résumé très approximatif. (Voir le Chapitre 2, Section 2, pour une introduction plus détaillée à ce riche corpus de recherche)
Je comprends les études décoloniales comme une critique des formes de domination sociale, politique, épistémique et territoriale qui ont été imposées dans le monde entier par la colonisation euro-américaine (en particulier la colonisation des Amériques), et qui ont subsisté même après la fin du colonialisme en tant qu'ordre politique explicite. Cette domination a conduit les colonialistes européens à imposer des hiérarchies raciales, politiques et sociales qui valorisent certains peuples/sociétés tout en privant d'autres de leurs droits (par exemple, les personnes à la peau blanche par rapport aux personnes à la peau plus foncée, les colons par rapport aux peuples autochtones, les hommes par rapport aux femmes, etc.) Ces hiérarchies ont également défini l'humanité comme étant séparée de la « nature » et habilitée à dominer toutes les formes de vie, et décrit la sphère de l'esprit/intellect comme supérieure et habilitée à dominer les affects et le corps. La culture occidentale issue de ces processus historiques repose donc sur une série de catégories binaires rigides, présentes partout sous forme fractale, de notre vie quotidienne aux sommets du pouvoir : civilisé/sauvage ; humanité/nature ; blanc/noir ; homme/femme ; etc.
Selon les études décoloniales, les avancées technologiques modernes, le capitalisme industriel ou la consommation ostentatoire qui définissent notre époque sont inséparables de la colonialité - c'est-à-dire de la logique sociale, politique et culturelle injuste décrite ci-dessus, qui est devenue un ordre hégémonique dans le monde entier. Par conséquent, lorsqu'ils et elles parlent de modernité, les chercheur·se·s décoloniaux font souvent référence à la modernité/colonialité (ou modernité-colonialité), en tant que terme unique, pour montrer comment la colonialité est la face cachée de la modernité « brillante et étincelante » : les deux vont de pair.
Par conséquent, la pensée décoloniale appelle à la nécessité de procéder à une décolonisation épistémique, c'est-à-dire de décentrer la pensée eurocentrique en mettant en avant d'autres perspectives non européennes (qui ne sont pas basées sur la philosophie cartésienne et les binaires). Et pour certain·e·s chercheur·se·s (comme ceux du projet Gesturing Towards Decolonial Futures, un collectif d'artistes, d'activistes et de chercheur·se·s), les structures sociales coloniales modernes et les habitudes d'être qu'elles ont créées sont « irréformables » et doivent donc être placées « sur leur lit de mort », et compostées, afin que d'autres possibilités de savoir, d'être et d'établir des relations puissent émerger, ce que l'on peut appeler la décolonisation ontologique. Cela implique une reconsidération radicale des héritages socio-historiques et de la manière dont ces constructions socioculturelles peuvent être remodelées, afin que les humains modernes puissent vivre de nouveaux récits, et devenir des aîné·e·s utiles et de bon·ne·s ancêtres pour toutes leurs relations.
Ouf ! Alors, quel est le rapport avec le DAF et le changement collectif radical ?
2. Une communauté privilégiée
Tout d'abord, les études décoloniales montrent qu'il est important, lors de la production de connaissances, de prêter attention à là d'où nous parlons - c'est-à-dire d'être conscient·e de la tendance moderne-coloniale à assumer une perspective universaliste et détachée, qui masque la façon dont notre identité et notre positionnement (au sein des hiérarchies de valeur modernes-coloniales) affectent notre façon de penser, et ce que nous valorisons. J'ai dit quelques mots sur ma propre position dans un résumé précédent.
L'article Deep Adaptation a été rédigé par un professeur d'université blanc, britannique, de classe moyenne, qui a passé la majeure partie de sa carrière dans le domaine de l'environnement. Il était destiné à être publié dans une revue scientifique, pour être lu par d'autres universitaires spécialisés dans le développement durable – principalement dans des pays du Nord.
Il n'est donc pas surprenant que les personnes qui se sont réunies pour discuter des implications de ce document, et qui ont formé la communauté du Deep Adaptation Forum, aient eu tendance à provenir de milieux socio-économiques et culturels similaires à ceux du professeur Bendell. D'après mon expérience, au moment où j'écris ces lignes, un·e participant·e actif·ve typique au DAF a tendance à être blanc·he, occidental·e, âgé·e de plus de 40 ans, issu·e de la classe moyenne, titulaire d'un diplôme universitaire, et à avoir déjà travaillé dans le domaine de l'environnement. Ce profil est très similaire au mien, bien que je sois plus jeune (et que je sois un homme, alors que la plupart des participant·e·s actifs·ves au DAF ont tendance à être des femmes). Cela peut expliquer pourquoi je me suis senti à l'aise en choisissant le DAF comme site de recherche, plutôt que d'autres contextes sociaux dans lesquels ma position sociale aurait pu être moins bien accueillie !
De quelle manière la position socio-économique et démographique des participant·e·s au DAF peut-elle affecter le potentiel d'un changement collectif radical s'effectuant grâce à cette communauté ?
Tout d'abord, le langage utilisé dans les espaces du DAF et les publications DA(F) est souvent perçu comme académique et abscons, ce que j'ai également entendu de la part de plusieurs participant·e·s au Forum. Les personnes qui ne sont pas familières de ce langage peuvent se sentir découragées de participer aux conversations sur l'AR, voire réduites au silence par la rhétorique des autres participant·e·s. Cela peut particulièrement affecter les membres venant de milieux sociaux marginalisés, et constituer ainsi un facteur explicatif de leur absence relative dans les groupes du DAF.
Plus important encore, peut-être, la rhétorique de l'AR elle-même a été ressentie comme un facteur d'exclusion par des personnes issues de milieux socioculturels et économiques différents.
Le cadre original de l'AR, tel qu'il est formulé dans l'article fondateur de Jem Bendell, était indéniablement plus axé sur la menace de perturbations futures d'un mode de vie considéré comme « normal » par les personnes issues de groupes démographiques tels que ceux décrits ci-dessus, et faisait peu de place à la prise en compte de perturbations tout aussi effrayantes, subies d'ores et déjà par des personnes moins privilégiées (et par le monde vivant de manière générale) de nos jours ou par le passé. Jusqu'en 2022, la page « À propos » du site web du DAF citait l'extrait suivant de l'article:
Le terme effondrement social ou sociétal est utilisé ici pour désigner la fin inégale de nos moyens actuels de subsistance, d'abri, de sécurité, de plaisir, d'identité et de sens.
Ni l'article de Jem Bendell, ni cette page web, n'ont pris en compte quel point de vue était englobé par ce petit mot « nos ». Pour reprendre les termes de Malika Virah-Sawmy et Viviana Jiménez, qui ont créé une page sur le site web du DAF concernant les « voix invisibilisées sur l'effondrement » :
Les moyens actuels de subsistance et de sécurité que certain·e·s d'entre nous connaissent, et que nous avons évoqués précédemment, n'ont pas été également répartis, voire n'ont pas existé, pour la majeure partie du monde. En fait, ils reposent sur des siècles d'injustices qui ont conduit à l'effondrement cyclique des sociétés. La majorité mondiale a connu à plusieurs reprises l'effondrement sociétal d'une manière ou d'une autre.
Et il est vrai que le cadre discursif du DAF à ses débuts n'attirait pas l'attention sur ces sujets, bien que la situation ait commencé à évoluer en 2022. Le professeur Bendell a également appelé à plus d'actions humanitaires et à davantage d'efforts de solidarité transnationale. Cependant, les difficultés rencontrées par le cercle D&D en ce qui concerne la collecte de fonds pour soutenir de tels efforts, ainsi que l'expérience personnelle de personnes racisées au sein du forum, confrontés au déni du lien qui existe entre racisme, colonialisme, et changement climatique, soulignent les difficultés à défendre ces idées dans un contexte où cette prise de conscience n'a été que tardivement mise en avant. Je tiens à reconnaître pleinement ma propre responsabilité dans cette situation, en tant que personne impliquée dans des rôles de leadership depuis le début du réseau.
En outre, comme indiqué dans le résumé précédent, ni l'article Deep Adaptation ni les textes fondateurs du DAF ne préconisaient un plan d'action particulier quant à la manière dont l'adaptation radicale devait être mise en pratique, de manière concrète. En conséquence, il n'y a pas eu d'appel explicite à démanteler les structures sociales capitalistes et les autres systèmes d'oppression, à redistribuer les richesses, ou à mettre en place des réparations pour les dommages historiques – bien que le Jem Bendell ait plaidé pour des mesures similaires dans des textes ultérieurs. Par conséquent, les espaces de discussion du DAF ont été perçus comme des lieux apolitiques permettant à des participant·e·s privilégié·e·s de se consoler mutuellement de la perte anticipée de leur mode de vie, au détriment des réformes radicales de l'ordre social qui s'imposent. Certain·e·s commentateur·ice·s ont même suggéré que l'anxiété liée aux impacts du changement climatique est souvent l'expression de la « fragilité blanche » ou d'une anxiété raciale. Compte tenu des émotions difficiles vécues par de nombreux·ses participant·e·s au DAF et de la composition démographique de la communauté, il est important de se pencher sur cette critique ; j'y reviendrai ci-dessous.
Enfin, au niveau psychosocial, il est également possible qu'en se donnant pour mission d'apporter des réponses aimantes aux crises socio-écologiques mondiales, dans un esprit de curiosité, de compassion et de respect, la rhétorique du DAF puisse être perçue comme décourageant l'expression de certains affects, en particulier la colère ou l'indignation, qui sont largement suscités par ces crises, vraisemblablement davantage au sein des populations moins privilégiées (et bien plus exposées à l'injustice et aux inégalités) qu'un·e participant·e typique du DAF. Si l'on ajoute à cela les points mentionnés ci-dessus, il est compréhensible que de nombreuses personnes moins privilégiées puissent se sentir aliénées par la rhétorique du DAF.
Je tiens à souligner que pour moi, le positionnement des espaces DAF – en tant qu'espaces majoritairement blancs, occidentaux, éduqués et de classe moyenne - n'est pas en soi problématique. Nous sommes ce que nous sommes. Cependant, je considère qu'un changement collectif radical exige de faire face au déni de la violence systémique, historique et continue, et de notre complicité à la destruction qui s'opère (comme je le développerai plus longuement dans le prochain résumé). Et je doute qu'il soit possible de le faire sans établir des relations de solidarité avec celles et ceux qui ont historiquement le plus souffert des aspects néfastes de la modernité-colonialité. Par conséquent, pour que des initiatives génératives orientées vers le changement puissent émerger grâce au DAF, il semble important de réduire les obstacles qui peuvent s'opposer à la formation de telles relations. En travaillant sur ces obstacles, le DAF lui-même peut devenir plus diversifié, mais il serait très risqué de faire de cette « diversité » l'objectif principal de ces efforts, compte tenu de la longue et néfaste histoire d'inclusion superficielle (tokenism) de représentant·e·s de groupes marginalisés dans des espaces dominés par des personnes plus privilégiées.
Mais alors, comment le DAF pourrait-il réduire les effets aliénants de son cadrage et de sa rhétorique ?
3. Vers l'amour décolonial
Tout d'abord, et de toute évidence, le langage utilisé dans les publications du DAF et au sein de la communauté elle-même doit être plus accessible, et éviter de centrer l'expérience de ses membres les plus privilégiés. Des efforts allant dans ce sens étaient en cours au moment de ma recherche : par exemple, des bénévoles aidaient à produire des versions « en clair » du site web du DAF. J'attirerai ici davantage l'attention sur la place de la rhétorique des réponses aimantes (loving responses) dans la rhétorique du DAF, et j'examinerai dans quelle mesure cette notion peut être élargie pour attirer davantage l'attention sur les questions de justice sociale.
Revenons à la théorie relationnelle du changement qui a été mise en avant (voir l'Annexe 5.4) dans le cadre du DAF peu après le début de la communauté, et qui est devenue une base philosophique essentielle pour le Forum. Selon ce cadre, l'une des principales raisons d'être des groupes et des espaces DAF était de mettre en œuvre la transcendance de l'effondrement, c'est-à-dire les changements psychologiques, spirituels et culturels qui peuvent permettre à un plus grand nombre de personnes de faire preuve d'une plus grande équanimité face aux perturbations futures et à la probabilité que notre situation échappe à notre contrôle. Les participant·e·s au Forum ont donc été invité·e·s à explorer un état d'esprit relationnel, et à surmonter notre endoctrinement culturel dans un état d'esprit de séparation, afin de contrecarrer les tendances sociopolitiques violentes et xénophobes qui risquent de devenir prédominantes dans un contexte d'effondrement sociétal. Simultanément, les pratiques relationnelles facilitées au sein de petits groupes, telles que le deep relating, visaient (comme je l'ai déjà mentionné) à encourager la réflexivité et la culture critique, afin de commencer à démanteler les schémas psychologiques alimentant l'état d'esprit de séparation (menant à des formes d'exclusion, ou « othering ») qui sous-tend tous les systèmes d'oppression.
De cette manière, le cadre dominant au sein du DAF s'est concentré sur les « réponses aimantes » en tant que stratégie visant à encourager des formes coopératives et non oppressives de changement social en période d'incertitude. Il trouve des échos dans le travail de l'éducatrice Sarah Jaquette Ray, qui recommande d'adopter une attitude de « curiosité, de flexibilité et de respect » (p.99) et de cultiver une « curiosité compatissante » (p.110) pour créer des alliances entre groupes sociaux autour de l'action contre le changement climatique, et pour s'appuyer sur l'anxiété climatique de manière constructive et non polarisante. Mais surtout, Ray insiste sur la nécessité de « faire du changement climatique une question de justice sociale, et de reconnaître que notre position dans la société — notre accès relatif au pouvoir et aux privilèges — affecte la façon dont nous définissons et ressentons [les implications de] ces questions » (p.106) – ce qui représente une perspective qui n'a émergé que tardivement dans le DAF. Ray valide aussi explicitement les sentiments de colère face à l'injustice et à l'oppression, mais appelle à la coopération et à la construction de communautés en dépit de ces émotions fortes :
C'est là le véritable défi : faire de la place à la fois pour la colère justifiée, et pour la compassion curieuse. (p.109)
Pour que les groupes et les espaces du DAF deviennent plus accueillants pour les participant·e·s issus de groupes marginalisés et motivé·e·s par des aspirations à un changement politique socialement juste, il peut être important de donner plus d'espace à la juste colère, et à la passion des gens pour la justice. De tels contenants font souvent partie de certaines méthodologies utilisées dans le cadre du DAF, telles que le Travail qui relie (Work that Reconnects).
Comme le souligne Christine Hentschel (2022), la rage et la colère « peuvent être visionnaires et créatives » et « transformées en soin, consolation, solidarité, et justice » (p.6). Ces affects ne doivent pas être invisibilisés rhétoriquement par l'intention de surmonter l'altérisation (othering).
Nelson Maldonado-Torres (2016) considère que la lutte pour transcender la séparation ontologique et le paradigme omniprésent de la guerre qui caractérisent notre époque nécessite à la fois de l'amour et de la rage. Rejetant les notions romantiques libérales de l'amour, il considère le concept d'amour décolonial de Chela Sandoval comme un élément essentiel de la décolonisation, en tant que projet politique et social.
Maldonado-Torres considère que l'amour décolonial est essentiel pour que les êtres humains retrouvent leur rôle de "nœud" d'amour et de compréhension, et pour permettre à l'amour et à la rage de cicatriser les blessures de la modernité et de la colonisation, tout en créant de nouveaux ponts entre les personnes qui ont été séparées.
Mais à quoi ressemble cet amour, en pratique ? Une façon de l'exprimer pourrait être celle des réparations décoloniales, comme suggéré par Yomaira Figueroa (2015). Celles-ci impliquent « une reconnaissance de la violence structurelle, sexuée, et intergénérationnelle, et un éloignement de sa normalisation », exemplifiée par des réparations mises en oeuvre vis-à-vis de l'injustice historique et de la violence structurelle, en tant qu'« actes d'amour intergénérationnels et collectifs » - au-delà du calcul positiviste souvent utilisé sur les dettes ou les excuses qu'on estime dues. Il est important que ces réparations soient fondées sur une compréhension profonde des impacts et des conséquences persistants du colonialisme, et qu'elles s'accompagnent d'un engagement à transformer les idéologies et les structures qui perpétuent ces impacts et ces formes d'oppression.
Je pense que la mise en œuvre de réponses décoloniales aimantes à travers la praxis des réparations décoloniales peut constituer une voie fertile d'exploration et d'engagement politique pour les groupes du DAF, et pour d'autres communautés ayant des caractéristiques démographiques similaires. Elle pourrait permettre une reconnaissance plus profonde des préjudices systémiques et de notre complicité, et ouvrir la voie à un engagement plus généreux dans les luttes des groupes et communautés marginalisés. Cela pourrait impliquer de donner de l'espace à l'expression et au témoignage de la colère, de la rage, et d'autres affects de résistance au sein de contenants appropriés, tout en préservant la compassion, la curiosité et le respect comme valeurs centrales guidant les « actes d'amour intergénérationnels et collectifs » préconisés par Figueroa. En outre, les réparations peuvent être considérées comme un ingrédient essentiel de tout processus de réconciliation – un thème important au sein du cadre des « 4R » de l'AR.
Concrètement, ces réparations pourraient consister, par exemple, à faire pression sur les gouvernements pour qu'ils procèdent à l'annulation de la dette des pays du Sud, ou qu'ils autorisent la liberté de circulation transfrontalière en tant que mesures essentielles de justice climatique et d'adaptation ; ou d'exiger des réparations suite à l'esclavage et à la traite transatlantique, et la restitution des objets culturels et des parties de corps humains qui ont été volés par les puissances coloniales européennes en Afrique et ailleurs, et qui se trouvent exposés dans des galeries d'art ou archivés dans des musées et bibliothèques en Europe. À un niveau plus personnel ou communautaire, les réparations peuvent également être envisagées comme une décolonisation des pratiques de solidarité, par le biais d'une solidarité inconditionnelle (matérielle et politique) avec les luttes autochtones, d'une réflexion critique sur la manière de décoloniser l'effort de solidarité lui-même, ainsi que « prendre des mesures actives pour construire de ‘bonnes’ relations, en s'engageant à la fois à nommer et à réparer les injustices matérielles, épistémiques, culturelles, et politiques du présent et du passé. »
Passons maintenant à la question des éco-émotions en tant que sujet de discussion clé au sein des espaces DAF.
4. Les éco-émotions et la nécessité d'une action constructive
Comme je l'ai montré dans le post précédent, les processus relationnels et somatiques jouent un rôle important dans les groupes du DAF, et aident de nombreux·ses participant·e·s à mieux intégrer dans leur vie les émotions difficiles découlant de leur prise de conscience des crises socio-écologiques. Dans les études universitaires comme dans l'usage populaire, ces émotions difficiles sont souvent regroupées sous des étiquettes générales telles que anxiété écologique ou solastalgie. Différent·e·s chercheur·se·s ont discuté du manque de clarté conceptuelle qui caractérise ce domaine émergent, et ont souligné que cette expérience complexe peut englober des sentiments de frustration, d'accablement, de culpabilité, de chagrin, de peur, d'engourdissement, d'incertitude pour l'avenir, un sentiment d'attachement perturbé à un lieu, des préoccupations existentielles concernant le sens et la perte, ainsi que la colère ou le sentiment de trahison, le stress pré- et post-traumatique, ou même l'amour et l'émerveillement. Les enquêtes diffusées au cours de notre recherche montrent un éventail tout aussi varié de réactions émotionnelles à l'anticipation ou à l'expérience de l'effondrement de la société parmi les participant·e·s au DAF. J'utiliserai le terme éco-émotions pour les désigner, comme le fait Panu Pihkala.
Compte tenu du contexte socioculturel et économique relativement privilégié de la plupart des participant·e·s au DAF, le fait de passer du temps à traiter ses éco-émotions constitue-t-il une indulgence aux dépens de l'organisation politique, comme certain·e·s l'ont suggéré ?
Tout d'abord, il est important de noter que les éco-émotions sont loin d'être l'apanage des démographies blanches privilégiées. La recherche indique que les communautés défavorisées - en particulier les personnes racialisées - dans les pays du Nord sont aussi susceptibles, voire plus susceptibles, d'être affectées par de telles émotions, en raison de leur plus forte exposition aux impacts environnementaux de toutes sortes ; en effet, une étude qui a interrogé 10 000 jeunes du monde entier a trouvé que 75 % des jeunes des pays du Sud, tels que le Nigeria, l'Inde ou les Philippines, estimaient que la crise climatique avait un impact négatif sur leur capacité à fonctionner au quotidien, contrairement aux pays moins touchés par les catastrophes climatiques, tels que le Royaume-Uni, où 45 % des personnes interrogées se sentaient tout de même négativement affectées. Les communautés autochtones du monde entier sont particulièrement touchées par les éco-émotions, en raison des pertes écologiques physiques auxquelles elles sont confrontées, ainsi qu'à des perturbations de leurs connaissances environnementales, à la perte de leur identité, ainsi qu'à des pertes écologiques futures anticipées. En d'autres termes, les éco-émotions ont manifestement un impact considérable sur les communautés les plus exposées aux crises écologiques à l'échelle mondiale, en raison d'inégalités et d'injustices structurelles. Cela souligne la nécessité d'offrir un soutien de santé mentale à celles et ceux qui ont souvent le moins d'accès social et économique à ce genre de soutien.
Pourquoi, alors, les groupes démographiques plus privilégiés (ou blancs) ont-ils été dénoncés comme principalement concernés par le désir de soulager leurs éco-émotions ? Cette perception peut être partiellement expliquée par des asymmétries dans l'accès au discours scientifique et médical sur des sujets comme celui des eco-emotions, d'une part, et par un meilleur accès à des moyens de communication sur ces questions, d'autre part. D'autres groupes démographiques peuvent manquer de vocabulaire pour discuter de ces sujets, ou se sentir stigmatisés lorsqu'ils le font.
Néanmoins, il semble justifié de craindre que les éco-émotions dans les groupes dominants n'engendrent de la xénophobie et même des formes de fascisme : des chercheur·se·s ont montré que l'anxiété peut être une source de routines défensives qui peuvent saper les efforts collectifs en faveur d'un changement génératif. Comment éviter cela ?
Selon les psychologues, les éco-émotions font partie intégrante de la prise de conscience des crises socio-écologiques et peuvent en fait être mises à profit pour un changement positif. Mais pour cela, ces émotions doivent être correctement prises en compte, si possible par des interventions de groupe ou communautaires, et non ignorées par une précipitation vers la résolution de problèmes, ce que les cultures contemporaines poussent la plupart d'entre nous à faire. De nombreux·ses chercheur·se·s ont plaidé en faveur d'un engagement constructif avec les émotions de chacun·e par le biais de processus et activités pratiques en groupes. Jo Hamilton (2022) montre que de telles activités peuvent permettre de développer la réflexivité émotionnelle – ou la conscience incarnée et relationnelle de (et l'attention portée à) la manière dont les gens s'engagent et ressentent les problèmes, les actions qu'ils entreprennent, les histoires et les visions du monde qu'ils habitent, et leurs perceptions d'une agentivité individuelle et collective. Elle a exploré des approches susceptibles de contribuer à une « profonde détermination et à une ressource permanente pour agir en faveur de la justice environnementale et sociale, et pour vivre l'avenir pour lequel il vaut la peine de se battre dans le présent » (p.1). Cependant, cela nécessite la possibilité de continuer à s'engager régulièrement dans ces pratiques, dans le cadre d'environnements sociaux qui offrent un lieu d'action, et dans lesquels s'« engager sur le long terme face au changement climatique » (p.16).
Cela correspond aux résultats du processus d'éco-anxiété et de deuil écologique décrit par Pihkala (2022), sur la base d'une vaste étude interdisciplinaire. L'une des idées clés de ce modèle est qu'une fois qu'une personne a pris conscience de la profondeur et de l'ampleur des problèmes socio-écologiques, il faut, pour faire face et s'adapter à cette prise de conscience (et, espérons-le, atteindre un stade où l'on peut vivre avec elle avec compétence), faire son deuil, passer à l'action et, enfin, prendre ses distances par rapport à ses éco-émotions. Si l'une de ces dimensions fait défaut (par exemple, si l'on néglige de traiter ses émotions), il est probable que cette personne finira par s'épuiser, et manquera de stabilité mentale et émotionnelle.
Je tire deux conclusions de ces études. Tout d'abord, elles valident un principe fondamental du DAF, à savoir que le développement de la réflexivité émotionnelle est en fait un aspect essentiel d'apprendre à vivre avec la conscience des crises socio-écologiques, et que ce travail intérieur permet de passer utilement à l'action suite à cette prise de conscience.
Deuxièmement, elles soulignent l'importance cruciale de trouver, dans la vie quotidienne, des occasions de s'engager activement sur ces questions parallèlement à ce travail intérieur. Cela est d'une importance cruciale (non seulement pour des raisons psychologiques, mais aussi éthiques). Cependant, il demeure important de faire preuve de discernement pour déterminer quelles formes d'action sont utiles, que ce soit pour atténuer la crise écologique ou pour faire progresser le bien-être humain, comme le souligne Pihkala.
Ainsi, dans le cas de communautés en ligne comme le DAF, il est probablement important de disposer de formes de leadership catalysant diverses formes d'action collective, ainsi que de structures et de processus de groupe favorisant le discernement critique ce faisant (je reviendrai sur ces aspects dans le prochain résumé). Et si l'on considère que les communautés plus vulnérables, et le monde vivant dans son ensemble, sont depuis longtemps en première ligne de l'effondrement écologique et sociétal, et qu'ils souffrent davantage de problèmes de santé physique, mentale et communautaire, il semble éthiquement nécessaire que toute action – y compris la construction de communautés locales – soit effectuée avant tout dans un esprit de solidarité avec ces autres habitants de la Terre. Les réparations décoloniales évoquées plus haut pourraient constituer de telles formes d'action.
5. Au-delà du dualisme nature-culture
Enfin, j'aborderai certains fondements philosophiques de l'AR et du DAF, et j'examinerai comment ces fondements ontologiques et épistémologiques (implicites ou explicites) peuvent bénéficier d'un examen critique.
Les chercheur·se·s décoloniaux, tels que Kothari et ses collègues (2019), désignent l'anthropocentrisme comme l'une des premières causes des crises socio-écologiques planétaires actuelles, en raison de
l'ancien principe monothéiste selon lequel un père, « Dieu », a créé la Terre pour le bénéfice de « ses » enfants humains... Au moins en Occident, ce principe a évolué vers une habitude philosophique consistant à opposer l'humanité à la nature, et a donné naissance à des dualismes connexes tels que la division entre le sujet et l'objet, l'esprit et le corps, le masculin et le féminin, le civilisé et le barbare. Ces catégories idéologiques classiques légitiment la dévastation du monde naturel, ainsi que l'exploitation des différences de sexe, de genre, de race et de civilisation. (p.xxii).
En effet, le clivage philosophique entre nature et culture (humains/non-humains) est l'un des marqueurs les plus distinctifs de la mentalité moderne-coloniale. Des anthropologues comme Philippe Descola (2015) ont montré que la notion même de « nature » est largement absente de toutes les onto-épistémologies autres que l'épistémologie moderne.
Ainsi, dépasser l'anthropocentrisme et le dualisme nature-culture (ainsi que d'autres binaires modernes-coloniaux) peut être considéré comme une tâche essentielle, afin d'explorer des manières de s'engager dans les crises socio-écologiques qui ne reproduisent pas les manières d'être et de connaître ayant conduit à ces crises. Quels éléments du discours et de la philosophie du DAF sont utiles pour s'engager dans cette tâche ou, au contraire, y font obstacle ?
5.1 Écologie profonde et biocentrisme
L'écologie profonde est une philosophie environnementale influente dont la prémisse fondamentale est la croyance que « les humains doivent changer radicalement leur relation à la nature, passant d'une relation qui valorise la nature uniquement pour son utilité pour les êtres humains à une relation qui reconnaît que la nature a une valeur inhérente. » En recommandant un passage « d'une perspective "anthropocentrique" à une perspective "biocentrique" », cette école de pensée permet de reconnaître que l'existence humaine est inséparable de celle des autres qu'humains, et met en avant une ontologie relationnelle.
Certains éléments montrent que l'écologie profonde est l'une des racines philosophiques de l'AR. Cela inclut des références explicites du fondateur de l'AR :
La perspective de l'écologie profonde nous invite à un récit non anthropocentrique de la relation entre l'humain et la nature.
La perspective biocentrique que suggère l'écologie profonde peut être considérée comme un pas en avant pour remédier à l'habitude philosophique d'opposer l'humanité à la nature. Cependant, cette perspective a également été critiquée pour sa façon de perpétuer le dualisme nature-culture, au cœur du paradigme moderne-colonial : en effet, comme le montre le passage ci-dessus, la « nature » demeure considérée comme une entité distincte de l'« humain ».
De plus, dans les écrits sur l'écologie profonde, la première a tendance à être valorisée par rapport à la seconde, ce qui peut être problématique en soi. Les critiques ont souligné que l'orientation biocentrique de l'écologie profonde, en établissant l'humanité comme une « menace démesurée sur la vie non-humaine à la surface de la planète », se prêtait à des interprétations misanthropes, ou même éco-fascistes - notamment lorsque ce vocabulaire est accompagné d'appels à réduire substantiellement la population humaine pour résoudre de supposés problèmes de « consommation de ressources naturelles ». D'autres ont également critiqué le mouvement pour son attachement à défendre la « nature sauvage », et pour les façons dont cette perspective préservationniste a pu se répercuter sur des communautés marginalisées comme les peuples autochtones, expulsés de leurs terres pour créer des parcs naturels.
Le lecteur remarquera peut-être des références à la nature ou au monde naturel dans certains de mes précédents résumés, que ce soit dans les témoignages des participant·e·s ou même dans mes propres mots, malgré mon intention consciente d'éviter de reproduire le dualisme nature-culture. Cela montre qu'il est très difficile de s'en extirper, quand le langage même que nous utilisons est tellement imprégné de ces oppositions binaires. En outre, la plupart de ces mentions véhiculent probablement, implicitement, le cadre de l'écologie profonde de « la nature comme quelque chose de vierge, de beau, de sauvage, à protéger. » Compte tenu des aspects problématiques d'un tel cadre discursif, il semble important de réaliser des efforts plus conscients au niveau du discours employé au sein de communautés préfiguratives comme le DAF - tout en reconnaissant que la question n'est pas tant que les individus deviennent plus vertueux, mais plutôt qu'il s'agit de mettre en œuvre un changement culturel. En fin de compte, l'objectif devrait être d'adopter une écologie qui renonce à l'idée même de « nature ». Pour reprendre les termes de Slavoj Zizek (2007), « La première prémisse d'une écologie véritablement radicale devrait être : "La nature n'existe pas." »
5.2 Une écologie décoloniale
Au-delà du dualisme nature-culture, l'écologie profonde a également été critiquée pour sa vision apolitique du changement de société. Cela a conduit des chercheur·se·s à recommander l'intégration de son ontologie relationnelle avec des cadres - tels que celui de l'écologie sociale - qui reconnaissent les luttes de classe des personnes marginalisées:
L'écologie sociale radicale étudie les conditions matérielles, sociales et spirituelles d'une société écologique en cherchant à éliminer la domination de l'homme sur la nature par l'élimination de la domination de l'humain sur l'humain. Elle relie les questions écologiques à un large éventail de questions sociales interconnectées.
De même, Malcolm Ferdinand (2019) reconnaît la valeur de l'ontologie gestalt de l'écologie profonde, qui met l'accent sur l'interdépendance de l'existence humaine et de l'existence autre qu'humaine. Mais pour éviter de considérer « les humains » et leurs diverses histoires comme un tout homogène, il appelle à « une ontologie relationnelle qui reconnaisse que nos existences et nos corps sont entremêlés des rencontres avec une pluralité d'humains et une pluralité de non-humains » (p.382).) Sur cette base, Ferdinand propose une écologie décoloniale comme « une écologie de lutte... il s'agit de remettre en cause les manières coloniales d'habiter la Terre et de vivre ensemble » (p.175). Comme l'écologie pirate de Fatima Ouassak (2023), l'écologie décoloniale établit la colonisation, le racisme, les discriminations de genre, mais aussi le spécisme, comme des processus faisant partie intégrante de la crise écologique :
L’écologie décoloniale fait des dégradations de vie sociale, de l’extractivisme des peaux Nègres et du racisme environnemental la cible première de l’action écologique. Oui, l’antiracisme et la critique décoloniale sont les clés de la lutte écologiste. (p.299)
L’enjeu collectif et urgent qui est posé ici est bien celui du renversement de l’habiter esclavagiste de la Terre asservissant animaux humains et non humains. (p.373)
Il y a beaucoup à faire pour que cette perspective imprègne davantage les espaces du DAF. Cela est particulièrement important pour éviter les formes de discours qui réduisent l'humanité à un sujet indifférencié causant un effondrement sociétal ou écologique, ce qui occulte les processus historiques qui ont entraîné de telles crises et les impacts très différents créés et subis par divers groupes démographiques (les plus évidents étant les colons européens par rapport aux peuples colonisés, ou les membres de la classe moyenne de la minorité mondiale par rapport aux membres de la classe ouvrière de la majorité mondiale).
Comme l'a montré ce résumé, l'évaluation de l'apprentissage social que j'ai réalisée au sein du DAF m'a amené à adopter une position critique et décoloniale qu'il était difficile d'intégrer dans la méthodologie d'évaluation Wenger-Trayner, qui est agnostique sur le plan du type d'apprentissage effectué. Par conséquent, afin d'approfondir ma réflexion sur ces questions, je me suis tourné vers un autre domaine de la littérature et de la pratique. Dans le prochain et dernier résumé, j'explorerai plus en détail la manière dont l'approche décoloniale est venue éclairer mon idée d'un changement collectif radical, et comment elle aide à évaluer la pertinence de FairCoop et du DAF à cet égard.